Depuis hier, jeudi 1er mai 2025, la mer Méditerranée est officiellement devenue une zone de contrôle des émissions d'oxydes de soufre et de particules (Med SOx ECA). Cette mesure, adoptée par l'Organisation Maritime Internationale (OMI) en décembre 2022, est maintenant pleinement entrée en vigueur, marquant un tournant majeur dans la protection de l'environnement marin méditerranéen et la qualité de l'air dans la région. Les navires opérant dans cette zone doivent désormais respecter des normes bien plus strictes concernant leurs émissions polluantes. [1]
Cette nouvelle zone devient ainsi la cinquième zone mondiale de contrôle des émissions d'oxydes de soufre, rejoignant d'autres zones déjà établies comme la mer Baltique et la mer du Nord. La Méditerranée, qui compte parmi les routes maritimes les plus fréquentées au monde avec environ 24% de la flotte mondiale de navires et 17% des croisières mondiales, bénéficiera désormais d'une protection renforcée contre l'un des polluants les plus nocifs émis par le transport maritime.
Une réglementation stricte pour limiter la pollution maritime
Concrètement, la teneur en soufre du carburant utilisé par les navires dans cette zone est désormais limitée à 0,10% masse par masse (m/m), soit cinq fois moins que la limite mondiale standard fixée à 0,50% m/m en dehors des zones de contrôle. Cette réduction drastique vise à diminuer considérablement les émissions polluantes provenant du trafic maritime en Méditerranée, un bassin semi-fermé particulièrement vulnérable aux pressions environnementales.
Cette mesure s'inscrit dans le cadre de l'annexe VI de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (MARPOL), qui établit des règles strictes pour prévenir la pollution atmosphérique causée par les navires. Les armateurs ont eu plus de deux ans pour se préparer à cette transition, depuis l'adoption de la mesure en décembre 2022 jusqu'à son entrée en vigueur ce 1er mai 2025.
Les navires traversant la Méditerranée doivent maintenant soit utiliser des carburants à très faible teneur en soufre, soit installer des systèmes d'épuration des gaz d'échappement (scrubbers) pour respecter les nouvelles limites d'émission. Les autorités maritimes des pays riverains sont chargées de contrôler le respect de ces nouvelles normes dans leurs eaux territoriales.
Des bénéfices majeurs pour l'environnement et la santé publique
Selon les estimations partagées par l'Organisation Maritime Internationale, cette nouvelle réglementation devrait permettre une réduction de 78,7% des émissions d'oxydes de soufre et une baisse annuelle de 8,5 millions de tonnes de ces polluants rejetés dans l'atmosphère. Les émissions de particules fines (PM 2,5), particulièrement nocives pour la santé respiratoire, devraient également diminuer de 23,7%. [2]
Les bénéfices pour la santé humaine sont considérables. La diminution des émissions de SOx provenant du transport maritime devrait contribuer à réduire les cas de cancer du poumon, de maladies cardiovasculaires, d'accidents vasculaires cérébraux et d'asthme infantile dans les zones côtières densément peuplées du pourtour méditerranéen. On estime que plus de 150 millions de personnes vivant dans les régions côtières méditerranéennes bénéficieront directement de cette amélioration de la qualité de l'air.
L'environnement marin méditerranéen, déjà sous pression en raison de multiples facteurs (surpêche, pollution plastique, changement climatique), profitera également de cette réduction significative de l'acidification causée par les émissions soufrées. Cette mesure contribuera à protéger les écosystèmes fragiles de la mer Méditerranée, notamment ses habitats côtiers et ses espèces menacées.
Une étape clé dans l'Année de l'Océan 2025
L'entrée en vigueur de la Med SOx ECA s'inscrit parfaitement dans le cadre de l'Année de l'Océan 2025, initiative annoncée par le président de la République française en juin 2023. Cette coïncidence renforce la portée symbolique de cette mesure et souligne l'urgence d'agir pour protéger les océans, véritables poumons bleus de notre planète.
L'adoption de cette zone de contrôle des émissions est le fruit d'un long processus multilatéral piloté par le Plan d'action pour la Méditerranée du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE/PAM), qui a permis aux pays riverains de la Méditerranée de forger un consensus et de soumettre une proposition coordonnée à l'OMI. Elle démontre que la coopération internationale reste un outil efficace face aux défis environnementaux transfrontaliers.
Cette mesure témoigne également d'une prise de conscience croissante du secteur maritime quant à son impact environnemental. Alors que le transport maritime représente environ 3% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l'industrie est de plus en plus encouragée à adopter des pratiques plus durables et à investir dans des technologies moins polluantes, comme les carburants alternatifs et les systèmes de propulsion innovants.
Les prochains mois seront cruciaux pour évaluer l'efficacité de la mise en œuvre de cette nouvelle réglementation et mesurer ses premiers impacts sur la qualité de l'air et la santé des écosystèmes méditerranéens. Des systèmes de surveillance ont été mis en place pour collecter des données et garantir le respect des nouvelles normes par l'ensemble des navires traversant la Méditerranée, un bassin maritime qui reste l'un des plus fréquentés au monde.