La Malaisie a franchi un nouveau pas décisif dans sa lutte contre la pollution plastique en annonçant mercredi 2 juillet 2025 l'entrée en vigueur d'une législation stricte visant à réduire drastiquement les importations massives de déchets plastiques. Cette mesure représente un tournant majeur pour ce pays d'Asie du Sud-Est qui fait face depuis des années à un afflux incontrôlé de déchets plastiques en provenance des pays développés.
Une réglementation renforcée aux conséquences majeures
Le ministère malaisien de l'Investissement, du Commerce et de l'Industrie a confirmé que le gouvernement est "engagé à favoriser un environnement commercial légitime, responsable et respectueux de l'environnement afin de soutenir des objectifs sociaux-économiques durables". Ces nouvelles règles, entrées en vigueur le 1er juillet 2025, marquent une rupture avec les pratiques antérieures en imposant des conditions drastiques aux importateurs de déchets plastiques.
La nouvelle législation prévoit la délivrance de "certificats d'approbation" uniquement aux importateurs qui respectent toutes les conditions de la législation malaisienne. Plus restrictif encore, ces autorisations ne seront accordées qu'aux pays ayant signé et ratifié la Convention de Bâle, un traité des Nations Unies de 1989 qui réglemente les mouvements de déchets dangereux [1].
Cette condition exclut de facto les États-Unis, principal exportateur de déchets plastiques vers la Malaisie, car ils ne font pas partie de la Convention de Bâle. Les États-Unis rejoignent ainsi le Timor oriental, Haïti et le Soudan du Sud dans la liste des pays non signataires de ce traité international fondamental pour la régulation du commerce des déchets dangereux.
L'ampleur du défi environnemental
Les chiffres révèlent l'ampleur du problème auquel fait face la Malaisie. En 2023, le pays a importé plus de 450 000 tonnes métriques de déchets plastiques, une quantité suffisante pour remplir environ 162 piscines de taille olympique selon la plateforme de données Statista. Cette masse considérable de déchets provient principalement des États-Unis, suivis par l'Allemagne et l'Espagne.
Cette situation trouve ses origines dans la décision de la Chine en 2018 de cesser la plupart de ses importations de déchets plastiques. Depuis lors, l'Asie du Sud-Est, et particulièrement la Malaisie, s'est retrouvée "inondée" de déchets plastiques en provenance d'économies développées comme les États-Unis et la Grande-Bretagne. De nombreuses entreprises de recyclage chinoises se sont alors délocalisées en Malaisie, entraînant l'acheminement d'énormes quantités de plastique, souvent sans autorisation légale.
Le gouvernement malaisien a averti qu'il "n'hésitera pas à agir fermement contre tout individu ou entreprise qui tenterait de contourner les contrôles sur les importations de déchets ou de s'engager dans des activités illicites d'importations de déchets". Cette déclaration fait écho aux efforts déjà déployés par les autorités malaisiennes qui ont saisi 106 conteneurs de déchets électroniques dangereux l'année dernière et démantelé un réseau d'importation illégale de déchets.
La nouvelle réglementation s'inscrit dans une démarche plus large de protection environnementale. En 2018, face à l'afflux massif de déchets plastiques suite à l'interdiction chinoise, le gouvernement malaisien avait déjà commencé à sévir contre les opérations de recyclage illégales. Entre 2019 et 2020, pas moins de 218 usines de recyclage illégales ont été fermées, et 150 conteneurs totalisant 3 737 tonnes de déchets plastiques illégaux ont été rapatriés vers leurs pays d'origine.
Cette mesure législative témoigne d'un changement d'approche fondamental de la Malaisie face au "colonialisme des déchets", terme utilisé par les militants environnementaux pour décrire l'exportation massive de déchets des pays riches vers les pays en développement. La Convention de Bâle, adoptée en 1989, avait justement été conçue pour répondre aux craintes des pays en développement, notamment africains, de devenir des lieux de stockage pour les déchets dangereux des pays développés.
En exigeant désormais que seuls les pays signataires de cette convention puissent exporter leurs déchets plastiques vers la Malaisie, le gouvernement de Kuala Lumpur envoie un signal fort à la communauté internationale. Cette décision pourrait inciter d'autres pays de la région à adopter des mesures similaires, transformant potentiellement la gestion mondiale des déchets plastiques.
L'impact de cette nouvelle législation dépasse les frontières malaisiennes. Elle force les pays exportateurs, particulièrement les États-Unis, à reconsidérer leur stratégie de gestion des déchets plastiques et pourrait les pousser à développer leurs propres infrastructures de recyclage plutôt que de continuer à exporter leurs déchets vers des pays en développement.